Tarko ou la désillusion d'un emblème UMP en banlieue
Tarek Mouadane, alias "Tarkozy" ou "Tarko", considéré en 2007 comme l'emblème de l'UMP en banlieue, a vu son étoile pâlir après une détention en 2011 suite à un accident mortel et porte aujourd'hui un regard critique sur la politique de son mentor en banlieue.
Le conte de fée n'aura pas duré pour ce jeune des cités de 31 ans, hyperactif lancé dans la "Sarkozie" par Rachida Dati, et actuellement sans emploi.
Tout bascule le 5 juillet 2011, lorsqu'il renverse mortellement un enfant de 9 ans avec sa voiture à Argenteuil (Val-d'Oise). "C'est un drame, j'y pense tous les jours", dit-il lors d'un entretien avec l'AFP.
Après trois semaines de prison pour "homicide involontaire par conducteur ayant fait usage de stupéfiants", selon une source proche du dossier, il est relâché et placé sous contrôle judiciaire en attendant un jugement.
Du coup, alors que la campagne présidentielle bat son plein, il se fait discret, mais compte bien se rendre dimanche au meeting de Nicolas Sarkozy à Villepinte (Seine-Saint-Denis).
En 2007, il était de tous les meetings du candidat UMP, apparaissant comme l'emblème de sa politique dans les banlieues. Tombé en disgrâce, il jure cependant n'avoir "rien à reprocher à Sarkozy, (mais) en veut beaucoup à son entourage" qui le tient à l'écart de son idole.
"Mon discours a été travesti, on a essayé de me faire passer pour un pro-UMP alors que je ne suis ni encarté, ni de gauche ou de droite", lance-t-il.
Pour lui, tout commence un soir d'octobre 2005. Alors que le ministre et futur candidat Sarkozy est chahuté lors de sa visite sur la dalle d'Argenteuil, le jeune impétueux l'interpelle sur son projet pour les banlieues. "Je n'ai pas demandé des aides sociales, juste ce qu'il comptait faire pour ces jeunes des quartiers qui n'ont pas d'emploi, qui veulent réussir", se souvient-il.
"Pied de nez"
Peu disert sur ses revenus, il dit vivre de l'aide de ses parents et des amis tandis qu'il travaille sur "un projet d'import-export de produits agroalimentaires vers Dubaï".
A l'instigation de Rachida Dati, il avait créé en 2006 l'association BBR (Bleu-Blanc-Rouge). "Un pied de nez au Front national pour leur dire que le drapeau bleu-blanc-rouge n'était pas qu'à eux", explique-t-il.
"Il ne faut pas se leurrer, cette association était censée valoriser les jeunes, leur trouver des centres d'intérêt mais son financement n'a pas servi à grand-chose à part à ces personnes-là", commente une militante associative d'Argenteuil, sous couvert de l'anonymat.
Avec 20.000 euros de subventions, "on a réalisé des table-rondes, on a fait venir des chefs d'entreprise, on a organisé des job-dating (recrutement express, ndlr) qui ont aidé les jeunes à trouver du travail, alors que des associations touchent beaucoup plus que ça pour créer des fêtes de quartiers!", se justifie "Tarko".
"C'est un petit du quartier, il s'est servi de l'opportunité pour essayer de faire bouger les choses", témoigne Mohamed, 40 ans, un voisin qui estime que ce rapprochement avec Sarkozy lui a attiré des hostilités sur place.
Crâne rasé, physique de boxeur, Tarek Mouadane se montre peu loquace sur BBR, mais plus bavard pour défendre l'intégration car il a "l'impression que les banlieues sont laissées entre parenthèses". "Il faudrait bien se repencher sur ces quartiers, prendre le pouls mais pas une fois tous les cinq ans", estime-t-il.
Alors fut-il un simple alibi ou pur opportuniste? "Peut-être que mon engagement a servi en période électorale, qu'on se serve de moi, pourquoi pas, mais c'est réciproque", dit-il. "Moi je me sers aussi de ces partis politiques" pour "les mettre devant des faits réels".
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